logo-mini

Antonio Bilotta Scultore

SCULPTEUR AVANT TOUT

S’il y a bien une histoire que raconte l’oeuvre d’Antonio Bilotta, c’est celle du tiraillement de l’artiste. Entre le doute, permanent, et la volonté malgré cela de continuer à s’exprimer à travers ses créations. Né aux Etats-Unis d’un père italien et d’une mère américaine, Antonio a grandi en Italie. Il se lance d’abord dans l’assemblage de décors de cinéma, en Italie puis en France. L’envie de changement arrive rapidement, avec, justement, ce besoin de créer. Ce sera la sculpture. Il se forme, devient l’assistant personnel du sculpteur Michele Zappino, voyage avec lui, aux Etats-Unis et ailleurs, et travaille sur des oeuvres monumentales. Apprentissage d’un style classique qui n’est pourtant pas sa voie.


Ses premières créations personnelles, des visages déformés, agissent comme un révélateur. Il part aux US, prend un atelier dans le quartier de Red Hook, Brooklyn, NYC. Son message, il le portera en utilisant des matériaux recyclés trouvés dans la rue. Des morceaux de bois, d’abord, qu’il cumule et assemble pour reconstituer les arbres qu’ils étaient, comme un retour aux sources. Puis, rapidement, le pneu qui constituera son médium de prédilection, sa marque de fabrique.
Tout ce qu’il est en tant qu’artiste, Antonio dit le devoir à ces années new-yorkaises. Elles ont changé sa manière de voir les choses, sa vision de l’art, différente de celle qu’il avait sur le vieux continent. Elles lui ont appris à être plus modulable et ouvert.
Mais la vie à New York coûte cher. Son activité ne lui permet matériellement pas de rester. S’il veut continuer à creuser son sillon d’artiste, il doit déménager. Retour en Europe, malgré lui. Impasse mentale. Il songe à cesser mais veut produire une dernière oeuvre. Celle qui est présentée dans ces pages. Une installation de morceaux de pneumatique, représentant son corps d’artiste, divisé en 71 parts réparties dans autant d’urnes de verre, remises aux amis, collectionneurs et autres personnes qui l’ont toujours encouragé dans cette voie. Une manière de se séparer de cette partie artistique en lui. Telle était son idée.


C’est pendant qu’il élabore ce projet qu’il se rend compte que sa vie n’aura pas de sens sans cette activité de création. Cette mort artistique organisée agit comme une renaissance. L’énergie revient. Il réalise que ce projet de « corps artistique » était aussi une manière de donner une voix aux artistes qui, à un moment donné, ferment la porte de leur atelier, sans que personne ne s’en aperçoive. Antonio vient d’être sélectionné pour la biennale de Venise par la fondation GAA (GlobalArtAffairs) avec le soutien du European Cultural Center. Son travail est exposé au Palazzo Mora jusqu’au mois de novembre.


Le risque de tout laisser tomber existe toujours, avouet-il. Pour lui, « on ne crée que pour les autres. Un travail doit être vu et partagé. Il n’est pas fait pour être conservé dans un atelier ». Entre les hauts et les bas d’une vie d’artiste, entre le doute et le besoin irrépressible de créer, pas le choix, il faut continuer. L’écrivain Rainer Maria Rilke l’a très bien résumé dans ses Lettres à un jeune poète : « être artiste, c’est ne pas compter, c’est croître comme l’arbre qui ne presse pas sa sève, qui résiste, confiant, aux grands vents du printemps, sans craindre que l’été puisse ne pas venir. L’été vient. Mais il ne vient que pour ceux qui savent attendre, aussi tranquilles et ouverts que s’ils avaient l’éternité devant eux ».

Partager